« Nous sommes tous des serviteurs pour le bien-être du Liban »        

GEORGES N. FREM (1934-2006)

 

Par Adeline Georges-Khouri.

Le libanais Georges Frem est mondialement connu pour avoir créé en 1956 le groupe de production d’emballages plastiques et papier INDEVCO. Georges est né en 1934 dans une famille qui a eu des revers financiers très durs et était le second d’une fratrie de huit. Il continua ses études tout en travaillant et pu obtenir son diplôme universitaire.

Il a développé très tôt dans son cœur un amour de la personne pauvre, ce qui a donné une direction à toute sa vie.

La société dépend de nous et de nos actes. Frem y croyait, il a donc agit. Il a mis ses qualités et compétences au service de son pays. Son amour pour le bien-être des personnes s’est révélé durant la guerre civile au Liban ; il apportait les profits de ses industries basées dans plusieurs pays à l’étranger pour financer les pertes que ses sociétés accusaient au Liban ; grâce à sa stratégie, les employés n’ont pas été congédiés en développant une véritable protection sociale pour tous.

Il s’est investi non pas pour réussir une carrière et briller, mais pour servir son pays et aider les Libanais, sans distinction, en détresse car il aimait profondément son pays.

Ce libanais a donc monté une entreprise d’emballage plastique et de papier. Il a commencé par s’occuper de ses propres employés, à voir le meilleur en eux-mêmes en les aidants à développer leurs talents. Il les encourageait à être honnêtes. Il recherchait leur bien pour eux-mêmes et non pour lui et l’entreprise.

Georges Frem introduit une nouvelle valeur dans son entreprise : le leadership service. Il disait : «Ce qui est bon pour la communauté est bon pour l’entreprise. Ce qui est bon pour l’entreprise, nous nous efforcerons de le faire parfaitement pour enrichir la vie de nos employés».

C’est en partie grâce à cela que son entreprise a pu réussir à connaître ce succès mondial. Il affirme « l’argent est le sous-produit mais pas l’objectif principal ». L’argent qu’il en tirait était pour lui source de grande richesse : celle d’aider les autres. Il n’hésitait pas à la partager et à investir pour des bonnes causes, il parvenait à son véritable but, aider les autres, servir son pays.

Georges prépara sa succession pour ne pas se rendre irremplaçable. Il avait à cœur de partager les connaissances et les responsabilités en encourageant son équipe à faire preuve de créativité pour un cadre sûr et innovant. Durant ces dernières années de maladies, il délégua ses tâches à son fils M. Neemat Frem, qui assure jusqu’à aujourd’hui la croissance d’INDEVCO. Sa pratique de l’inclusion (écoute des autres), de la collégialité (approche participative dans la décision) et de la succession (délégation de fonction) ont transformé INDEVCO en un groupe d’ampleur mondiale.

Sa réussite tenait à son honnêteté et à ses qualités humaines, mais nous ne pouvons pas imaginer son exploit sans ses compétences intellectuelles remarquables dans l’industrie qu’il a mises au service de son pays.

Le Président libanais l’appela pour intégrer le premier cabinet, composé d’experts. Après de nombreuses hésitations, Frem accepta : il y voyait l’opportunité de s’investir davantage pour aider les libanais en difficulté.

Mais tout ne se passa pas comme prévu. Alors qu’il était ministre des ressources hydrauliques et électriques, Georges confia à la société italienne Ansaldo des travaux pour les usines électriques. Il se rendit compte que le prix proposé par Ansaldo était beaucoup trop élevé en raison de commissions versées à de hauts fonctionnaires libanais. Grâce à son honnêteté et malgré la pression qui l’entourait, il rejeta ce partenariat. Il a voulu tenir son principe d’honnêteté jusqu’au bout, car il croyait en la société libanaise.

C’est dans ces moments-là qu’on se rend compte que l’honnêteté demande du courage. Frem n’en manquait pas.

Il voulait rester authentique car les Libanais méritent des gens de confiance.  On trouve très souvent des scandales en politique, mais on ne parle pas assez de ceux qui sont honnêtes, confiants et généreux comme Georges Frem. Georges fut aussi ministre des Postes et des Télécommunications, ministre de l’Industrie et du Pétrole et ministre de l’Industrie.

Il avait à cœur tous les Libanais sans aucune distinction, Chrétiens et Musulmans. Il fut décoré « Commander, National Order of the Cedars » pour son service national.

Celui-ci a continué à développer ses vertus en aidant les autres à développer les leurs dans le cadre de son empire industriel mais aussi dans la Fondation INDEVCO, aujourd’hui tenue par sa fille Mrs. Rania Frem El-Khoury sous le nom « Georges N. Frem Foundation », pour répondre directement aux besoins sanitaires, éducatifs et sociaux.

Il s’est aussi engagé dans le mouvement « Initiative of change » qui propage dans le monde entier un langage humain et spirituel pour un changement sur la base des valeurs morales. Il a aussi rejoint le Caux Round Table en Suisse, présidé par Frits Philips le PDG de la société Philips, qui est une association de grands industriels dans le monde qui croient comme lui que l’homme passe avant les profits dans le travail.

L’éducation de la jeunesse libanaise tenait une place privilégiée dans son cœur et il décida dans la plus grande discrétion de fonder l’association « les amis de l’école officielle » pour assurer les besoins fondamentaux de ces écoles durant la guerre civile du Liban. Frem a octroyé de nombreuses bourses scolaires et universitaires. Il en était le donateur principal sur ses propres revenus et tenait à passer incognito pour préserver la dignité des personnes. Une preuve de sa grande humilité fraternelle.

Il donnait beaucoup d’importance à la vie de famille ; soucieux d’être présent auprès de sa femme et des enfants. Il était membre du Conseil Pontifical de la Famille créé par Saint Jean Paul II. Il encourageait les membres de sa famille à servir le bien commun à travers différentes associations.

Georges fut décoré de l’ordre pontifical de Saint-Sylvestre par Saint Jean Paul II pour son dévouement à l’Eglise et à la société. Il cherchait la plénitude de vie et savait motiver ses proches collaborateurs sur la même voie.

Georges Frem avait foi en sa nation et il savait que chacune de ses actions comptait. Enfin il allait au-delà des frontières humaines pour contempler l’Homme et dépasser les différences en s’intéressant au dialogue, car il savait que le dialogue était le pilier pour une paix durable au Liban.